Jeudi 5 novembre dernier, l’agence ATMO Occitanie, par la voix de sa Vice-Présidente Régine Lange, a publié les résultats régionaux de la campagne nationale exploratoire de surveillance des produits phytosanitaires dans l’air, pilotée par l’ANSES*.
Sans replacer ces résultats dans leur contexte – campagne exploratoire – et sans rappeler que les agriculteurs appliquent les produits de protection des plantes, en agriculture conventionnelle et biologique, en toute légalité et souvent en deçà des seuils autorisés, leur reprise médiatique ne pouvait
qu’une fois encore jeter le discrédit sur notre profession.


La Chambre régionale d’agriculture dénonce cette mise en scène et les raccourcis faits en guise de conclusions de cette étude alors même, qu’en tant que membre du Conseil d’Administration d’ATMO,
nous avions demandé que soient mis en avant des éléments explicatifs (pression sanitaire exceptionnelle en 2018 lié aux mauvaises conditions météorologiques tout comme les nombreuses actions entreprises
par la Profession agricole en faveur d’un moindre recours aux produits phytosanitaires). En effet, nous pouvons prouver notre engagement concret dans cette démarche comme en témoignaient encore récemment certaines de nos journées Innov’Action qui mettent en avant les pratiques innovantes dans les exploitations, avec la volonté de communiquer largement sur leurs bons résultats afin de les dupliquer, ou encore le fait que l’Occitanie soit la région française qui totalise le plus d’exploitations agricoles
certifiées Agriculture Biologique.

Alors, face à un déferlement médiatique préjudiciable à notre Profession, nous souhaitons apporter quelques éléments de réponse :

  1. Les agriculteurs utilisent les produits phytosanitaires en respectant une réglementation qui s’enrichit d’année en année, au regard des études et expérimentations abouties, dans l’objectif de protéger les utilisateurs en premier lieu, ainsi que les milieux naturels : zones de non-traitement, interdiction de traitement en cas de vent > 3 Beaufort, retrait des matières actives les plus impactantes. Plus récemment, la protection des riverains de parcelles agricoles a été mise en place avec des distances de
    sécurité, éloignant les zones traitées des limites de propriété et avec les chartes d’engagements des utilisateurs de produits phytopharmaceutiques. Ces chartes, validées par les Préfets, sont aujourd’hui en vigueur dans tous les départements de la région Occitanie.
  2. Cette campagne de mesures nationales coordonnée par l’ANSES est exploratoire. Cela veut donc dire qu’il est prématuré et dangereux de tirer aujourd’hui des conclusions sur le lien entre présence et
    danger. Nous pourrions mettre en avant le fait que les produits sont retrouvés à des quantités infinitésimales (quelques nanogrammes par m3 d’air) quand le dioxyde d’azote (polluant généré par le
    trafic routier) ou les particules fines sont retrouvées à hauteur de plusieurs dizaines de microgrammes par m3 d’air, soit des concentrations mille fois plus élevées. Or, nous ne sommes pas médecins et ne rentrerons pas dans ce débat : laissons la science nous démontrer s’il est plus dangereux pour la santé de vivre en milieu rural ou urbain ! Nous ne remettons pas en cause la dangerosité potentielle des
    produits phytosanitaires, en premier lieu pour les applicateurs. Mais ces travaux doivent nous permettre collectivement d’améliorer les connaissances pour aider les parties prenantes à comprendre
    les phénomènes en jeu. Ce n’est qu’à condition d’approfondir les connaissances et sans viser la création de nouvelles réglementations que la Profession agricole s’associera à de futurs travaux.

3. L’analyse de ces données* montre l’incidence majeure des conditions météorologiques dans le recours aux produits phytopharmaceutiques par les agriculteurs :
• Cela était bien illustré par la différence des mesures observées sur le site viticole de l’Aude entre les campagnes 2018 et 2019 concernant les fongicides :
o Printemps/Eté 2018 très pluvieux (en fréquence notamment) sur le Bassin Languedoc -> Pression mildiou exceptionnellement élevée et continue (attestée par les différents Bulletin de Santé du Végétal émis sur la période) -> un besoin de recourir à l’utilisation des produits de protection des plantes de façon plus importante pour les viticulteurs afin de
sauver leur récolte.
o Printemps/Eté 2019 avec une pluviométrie plus conforme « aux normales » -> Pression mildiou peu élevée -> Faible recours aux produits phytopharmaceutiques par les viticulteurs.
• L’intensité du recours aux herbicides est également liée aux conditions météo : l’hiver doux et humide de fin 2019 a favorisé la pousse des adventices au printemps et a augmenté le nombre de passages de traitement.
• Face à cela, la surveillance sanitaire des cultures et la prévision des risques épidémiologiques par filière et territoire, intégrant les prévisions climatiques, sont indispensables pour aider les agriculteurs à prendre leur décision d’intervention et ne traiter qu’à la condition d’un risque élevé.

  1. Les résultats de cette première campagne de mesure des résidus de produits phytopharmaceutiques dans l’air doit nous encourager à améliorer les connaissances pour mieux comprendre les
    mécanismes en jeu. Toutefois, ils ne doivent pas masquer les évolutions de pratiques en faveur de la protection intégrée des cultures déjà engagées par la Profession Agricole, parmi lesquelles :
    • Un nombre croissant d’exploitations agricoles certifiées Haute Valeur Environnementale en Occitanie et un engagement fort, notamment de la Profession viticole dans cette voie (plus de 90% des caves viticoles de la région engagées dans la démarche de certification). Cette certification
    comprend un engagement important des producteurs en matière de réduction d’usage des produits phytopharmaceutiques.
    • Près de 1000 exploitations agricoles engagées dans une démarche de réduction d’utilisation de produits phytopharmaceutiques en Occitanie au travers des dispositifs DEPHY, Groupes 30.000 du plan Ecophyto, ainsi que des GIEE. Majoritairement accompagnés par les Chambres
    d’agriculture, ces producteurs ont réduit de 15 à 30 % le recours aux produits phytopharmaceutiques.
    • Le matériel de pulvérisation se modernise et les performances des équipements au regard de la réduction de la dérive s’améliorent grandement. Il faut accompagner la modernisation du parc
    matériel des agriculteurs en ce sens. Nous comptons pour cela sur les dispositifs mobilisant du FEADER pilotés par le Conseil Régional, mais aussi sur les dispositifs prévus dans le cadre du Plan de relance.

    L’agriculture et l’agro-alimentaire sont les piliers de l’économie régionale, une importance d’autant plus accrue en cette période de pandémie où de nombreuses initiatives sont mises en place sur les marchés, au sein de drive fermiers ou des plateformes en ligne qui valorisent les circuits courts. Les agriculteurs et agricultrices de la région Occitanie entendent les préoccupations de leurs concitoyens et s’engagent à leur fournir chaque jour une alimentation saine, des produits de qualité tout en leur permettant de vivre dans
    un environnement préservé.

    Denis CARRETIER
    Président de la Chambre Régionale d’agriculture d’Occitanie